Approche sensorimotrice de la présence pour la mise au pointd'un simulateur de conduite de deux-roues motorisé
Porteur de projet, laboratoire et organisme :
Régis Lobjois, LEPSiS, Ifsttar
Partenaires du projet :
Institut de Recherche en Communications et Cybernétique de Nantes (IRCCyN)- Équipe Psychologie, Cognition, Technologie - UMR CNRS 6597
UFR STAPS, Université Paris Sud - Laboratoire Complexité, Innovation, Activités Motrices et Sportives
Livrable final, 123p, 2013
Objectifs initiaux du projet
1. Mettre au point et déterminer le domaine de validité d’un simulateur de conduite de deux-roues motorisés avec plate-forme dynamique :
a. Mise au point d’une stratégie de commande (modèle de conduite) intégrant la technique de contrebraquage, spécifi que de la conduite moto ;
b. Dimensionner le retour d’information sensorielle, qu’elle soit haptique (retour d’effort dans le guidon), visuelle (amplitude du roulis visuel et effet sur les utilisateurs), ou vestibulaire (amplitude du roulis de la moto virtuelle et effet sur les utilisateurs) ;
2. Etudier les comportements en virage, en particulier le couplage sensorimoteur naturel existant entre prise d’informations visuelles et contrôle de la trajectoire en conduite moto.
Méthodes appliquées
Méthodes expérimentales - Neurosciences comportementales – Analyse du comportement - Oculométrie
Résultats majeurs
Ce travail a été décliné en trois tâches et quatre études expérimentales. Les trois tâches ont respectivement
porté sur la mise au point du modèle de conduite implémenté, sur le développement du tracking des mouvements oculaires dans un contexte de simulation de conduite et enfi n sur les effets des caractéristiques immersives et interactives du simulateur de conduite sur les comportements des utilisateurs. Deux des quatre expérimentations réalisées ont adressé les effets du modèle de conduite (conduite en mode braquage sans restitution de mouvement autre que l’inclinaison de la scène visuelle versus conduite en contre-braquage avec restitution de mouvement par la plateforme) sur les comportements de conduite. Les deux autres expérimentations ont étudié les effets du roulis visuel (inclinaison de la scène en sens opposé à celle de la moto) sur le contrôle de trajectoire et les stratégies visuelles. Au cours de ces différentes expérimentations, les participants ont réalisé des tâches de conduite à dominante sensorimotrice et complété différents questionnaires (mal du simulateur, sentiment de présence et un questionnaire destiné à recueillir les préférences individuelles). Les résultats ont mis en évidence un effet du modèle de conduite ainsi qu’un effet du roulis visuel sur les mesures objectives et subjectives.
En ce qui concerne le modèle de conduite, si les mesures subjectives ont clairement mis en évidence une préférence pour le modèle contre-braquage, les expériences 2, 3 et 4 ont montré que ce modèle s’accompagne d’une plus grande variabilité de la trajectoire, d’une plus grande diffi culté de contrôle de la direction et d’une stratégie de regard moins anticipative (expliquée par une demande accrue du contrôle de trajectoire). Néanmoins, une analyse fi ne des trajectoires empruntées en fonction du modèle de conduite a mis en évidence des stratégies de prise de virage conformes à une stratégie dite de sécurité (par opposition à une trajectoire dite de course consistant à couper le virage pour optimiser la vitesse de passage), telle qu’elle est préconisée dans les cursus de formation. Les caractéristiques immersives (ici, l’inclinaison de la moto) et interactives (ici, le contre-braquage) d’un simulateur deux-roues motorisés semblent donc essentielles pour
favoriser l’émergence de comportements naturels (à la condition que les participants à l’étude pratiquent effectivement ce type de trajectoire en situation réelle).
En ce qui concerne le roulis visuel, un consensus semble être trouvé quant à son introduction afin d’assurer l’illusion d’inclinaison. Le roulis visuel permet en effet de compenser les limites du roulis physique (puisqu’il s’accompagne d’une potentielle sensation de chute au-delà d’un certain seuil), de même qu’il permet d’aller dans le sens des principes physiques de l’inclinaison à moto en procédant à un rapprochement entre le conducteur et le sol. L’introduction de ce roulis visuel participerait donc à la fi délité physique de la simulation.
Cependant, l’introduction de ce roulis va immanquablement modifi er la dynamique de la scène visuelle. Les résultats obtenus (expériences 3 et 4) ont effectivement montré que, plus le roulis visuel augmente, plus les participants ont tendance à couper les virages. Cette position latérale moyenne décalée vers l’intérieur du virage s’accompagne d’une augmentation du nombre de sorties de voie. Quant aux directions du regard, les résultats mettent en évidence un relatif maintien de la stratégie point tangent. Cependant, si la manipulation du roulis visuel n’infl uence pas du tout le positionnement du regard sur l’axe horizontal, on observe, sur l’axe vertical, une direction moyenne du regard en amont du point tangent, synonyme d’une plus grande anticipation. Les différents gains testés suggèrent de recourir à un gain visuel qui n’excéderait pas 0.5 pour un simulateur à plateforme dynamique (soit 50% de l’inclinaison d’une moto réelle) et serait inférieur à 0.4 pour un simulateur statique.
Verrous ou points durs levés
Modèle de véhicule simulé intégrant la technique du contre-braquage.
Traitement automatique des stratégies visuelles replacées dans l’environnement 3D.
Perspectives ouvertes par le projet
1. Les trajectoires produites par les différents panels de sujets testés méritent d’être doublées d’études en situation réelle afin de disposer d’une vérité terrain.
2. Les sources d’amélioration du modèle de conduite en contre-braquage semblent devoir s’orienter vers un travail spécifi que sur le retour d’effort guidon (manque de couple dans les virages), sur la sensibilité des capteurs d’effort (meilleure prise en compte du poids du conducteur), vers l’évaluation de différents gains pour le roulis physique (et de son couplage avec le roulis visuel), ou encore vers une comparaison entre une stratégie de commande reposant sur le maintien de l’inclinaison dans le virage et une seconde restituant une inclinaison (tilt) uniquement pendant les phases transitoires.
3. Il ne se dégage pas de conclusion claire sur l’intérêt et les limites de l’introduction du roulis visuel pour la simulation de conduite moto.