Porteuse de projet, laboratoire et organisme :

Joceline Rogé, LESCOT, TS2, IFSTTAR

Partenaire du projet :

Université de Lyon 2, Laboratoire d’étude des mécanismes cognitifs (EMC)

Livrable final

Objectifs initiaux du projet

L’objectif principal de ce projet est, d’une part, d’identifier les situations et les conditions dans lesquelles les cyclistes déclarent avoir été peu ou pas vus par les autres usagers de la route et, d’autre part, de vérifier si les automobilistes rencontrent effectivement des difficultés pour les détecter dans ces circonstances ; ce dernier point sera étudié en environnement virtuel (à l’aide d’un simulateur de conduite automobile).
Une analyse originale de données quantitatives et qualitatives d’accidents (comprenant, entre autres, des récits d’accidents impliquant des bicyclettes et des véhicules légers) ainsi qu’une étude en contexte naturel avec une cohorte de cyclistes observés sur Lyon et Paris seront réalisées dans le cadre de ce projet. Un équipement d’aide à la visibilité utilisé par les cyclistes sera testé dans une expérience réalisée dans un simulateur de conduite afi n d’étudier son effet sur la capacité des automobilistes à détecter les cyclistes. Des
retombées scientifi ques (en termes de connaissances et de développement d’outils pour la recherche sur les usagers vulnérables) et des applications des résultats obtenus grâce à ces trois approches complémentaires sont attendues.

Méthodes appliquées

Des scénarios typiques d’accident ont été identifiés grâce à l’analyse des données d’accidents (collisions cycliste-véhicule léger et récits de choc ou de chutes). Une étude effectuée en contexte naturel a consisté à suivre des cyclistes réguliers dans l’ensemble de leurs déplacements en ville. Des enregistrements audiovisuels de leurs déplacements, des informations relatives à des situations de mauvaise visibilité recueillies dans un journal de bord rempli régulièrement par les cyclistes et des entretiens d’auto-confrontation ont servi à identifier parmi ces situations critiques celles dans lesquelles les cyclistes estimaient être peu visibles pour les autres conducteurs. Enfin, la capacité de détection des cyclistes par les automobilistes a été étudiée à l’aide d’un simulateur de conduite dans lequel certaines situations critiques ont été recréées afin de mesurer la distance de visibilité des cyclistes pour les automobilistes.

Résultats majeurs

Une synthèse bibliographique porte sur l’association entre la visibilité (conspicuité) et le risque d’accidents à vélo, sur l’utilisation d’équipements de visibilité chez les cyclistes accidentés et sur plusieurs typologies d’accident à vélo. Cette revue de la littérature inclut également la présentation de différents protocoles expérimentaux utilisés pour étudier la visibilité des cyclistes pour les autres usagers, l’effet des équipements d’aide à la visibilité et des études relatives à la perception par les cyclistes de leur propre visibilité.
Une analyse des données d’accidents (298 cas de collision ou évitement impliquant un cycliste) a été faite à partir des données du registre du Rhône. Ces accidents ont été catégorisés en fonction de 3 typologies existantes (celle de Got, celle de Tarron et celle de Bué). Une liste de situations d’accidents (impliquant le cycliste et un tiers motorisé) les plus fréquentes a été établie à partir de ces données. L’étude exploratoire des équipements de conspicuité utilisés indique des résultats contre-intuitifs qui sont similaires à ceux rencontrés dans la littérature, et qui pourraient s’expliquer par des biais méthodologiques (biais de sélection et biais de déclaration).
Une étude en contexte naturel qui s’est déroulée sur Paris et Lyon a permis d’identifier plusieurs situations d’intérêt dans lesquelles les cyclistes se sentent en difficulté et qui sont associées, pour certaines, à un problème de faible visibilité du cycliste. Parmi celles-ci, plusieurs situations présentent un intérêt particulier pour l’étude sur simulateur de conduite: celle où le véhicule motorisé quitte ou entre dans une place de stationnement, celle dans laquelle l’automobiliste ouvre sa portière au moment où le cycliste arrive à sa hauteur, celle où le véhicule motorisé tourne à droite et coupe la trajectoire du cycliste allant tout droit, celle où le véhicule léger change de direction alors que le cycliste remonte une fi le (ou roule entre deux fi les) et
celle où le véhicule motorisé provenant de la droite à une intersection coupe la trajectoire du cycliste.

Plusieurs situations identifiées préalablement par les cyclistes ont été recrées dans un simulateur de conduite automobile. Une première expérience a permis de recueillir l’avis d’automobilistes sur le réalisme des comportements du cycliste, de la base et des situations mais aussi de tester la capacité des automobilistes à détecter les cyclistes. Les résultats obtenus permettent d’observer que les automobilistes exclusifs (non cyclistes) ont plus de collisions avec des cyclistes que les automobilistes-cyclistes et qu’ils détectent moins facilement les cyclistes dans l’environnement urbain quelle que soit le type de situations (à faible ou à haute visibilité). Une deuxième expérience sur simulateur a été réalisée afin de tester l’effet d’un système d’aide à la visibilité équipant le cycliste (le gilet jaune) dans les mêmes situations d’interaction entre le cycliste et l’automobiliste. Les résultats obtenus indiquent que cet équipement a un effet bénéfique sur la détection des cyclistes par les automobilistes quand il est utilisé de jour, mais pas systématiquement dans toutes les situations. L’ensemble des résultats a permis de conclure que la sélection attentionnelle du cycliste par l’automobiliste dépend de processus top-down (ou processus descendants) et de processus bottom-up (ou ascendants).

Perspectives ouvertes par le projet et verrous subsistants

Les données recueillies dans le cadre de ce projet sont très riches pour les équipementiers ou start-up qui cherchent à améliorer la visibilité des cyclistes. En effet, les situations critiques identifiées, la technique de mesure de la visibilité des cyclistes pour les autres usagers et l’approche scientifique générale (analyse des données d’accidents, de données récoltées en contexte naturel et expérimentation menée en environnement virtuel) pourraient permettre de tester et quantifier l’apport, en termes de visibilité, de systèmes d’aide existant et de prototypes en cours de développement.

Les résultats obtenus peuvent également être intégrés dans des simulateurs dédiés à la formation des automobilistes ou à la sensibilisation des cyclistes aux situations d’interaction automobiliste-cycliste risquées.
Une des retombées de ce projet concerne également la prévention routière puisque les résultats obtenus peuvent aider à concevoir des messages de sécurité routière destinés à alerter les automobilistes et les cyclistes sur les risques encourus dans les déplacements urbains de jour.