Les traumatismes cervicaux type "Whiplash" - Etude physiopathologique et clinique

Porteur de projet, laboratoire et organisme du porteur de projet :

Marc Tadié, président de l’Institut de Recherche sur la Moelle épinière et l’Encéphale

Partenaires du projet :

Laboratoire d’Accidentologie et de Biomécanique (LAB)
Unité Mixte de Recherche Épidémiologique et de Surveillance Transport Travail Environnement (UMRESTTE), TS2, IFSTTAR
Université Paris 5 René Descartes, Laboratoire de Neurobiologie des Réseaux Sensorimoteurs
Centre Européen d’Etudes de sécurité et d’Analyse des Risques (CEESAR)


Vutthy PHAN. Rapport Rac1 - Synthèse cas étudiés dans le projet WHIPLASH. 31 p.

Les traumatismes cervicaux de type "Whiplash" : étude physiologique et clinique. 31 p. 2013.

Laporte, Sébastien & Wang, Danping & Lecompte, Jennyfer & Sophie, Blancho & Sandoz, Baptiste & Antoine, Feydy & Lindberg, Pavel & Adrian, Julien & Elodie, Chiarovano & Catherine, De & Vidal, Pierre-Paul. (2016). An Attempt of Early Detection of Poor Outcome after Whiplash. Frontiers in Neurology. 7. 177. 10.3389/fneur.2016.00177.


Objectifs initiaux du projet

L’objectif principal de cette étude était d’identifier de façon précoce les indices de mauvais pronostic fonctionnel des traumatismes cervicaux de type « whiplash » en clinique et imagerie avec, en outre, des tests physiopathologiques et neuropsychologiques.

Les objectifs secondaires sont de corréler les données cliniques, d’imagerie et de tractographie de fibres avec les données physiopathologiques et neuropsychologiques.

 Méthodes appliquées

Bilans réalisés en longitudinal sur six mois (clinique, physiopathologique, ORL, neuropsychologique)

 Résultats majeurs

Les résultats des analyses statistiques ont permis de mettre en évidence des facteurs cliniques et neuropsychologiques en phase précoce (entre J8 et J21 de l’accident) comme prédictifs d’une évolution défavorable de la symptomatologie du Whiplash.

L’examen clinique et neurologique recherchait essentiellement les troubles de l’équilibre et les douleurs étaient évaluées par les échelles visuelles analogiques (douleurs générales et céphalées). Au niveau de cet examen clinique, c’est essentiellement l’évaluation de la douleur (égale ou supérieure à 4 sur l’EVAD1 à 10) et une amplitude cervicale limitée en flexion qui étaient les éléments discriminants retrouvés. La cinématique de la tête et du tronc corrélés à des troubles objectivés de l’équilibre ont permis de discriminer les patients chroniques des patients non chroniques à un stade précoce après le whiplash. Par contraste, les tests vestibulaires étaient anormaux mais incapables de discriminer les patients chroniques de patients non chroniques.

Selon l’entretien neurospychologique et les tests qu’il comportait, les patients présentant un niveau élevé de catastrophisme au stade aigu et/ou un syndrome de stress post-traumatique associé à des anomalies de la cinématique de la tête ou du tronc, un test anormal de la fonction otolithique et à l’Equitest ou une combinaison de ces symptômes, présentaient des risques de chronicité.

Le niveau de catastrophisme des patients chroniques en stade aigu est de 7.71 ce qui est relativement conforme à ce qui avait été observé chez Koleck et collaborateurs (2006) chez des patients chroniques souffrant de douleurs du bas du dos. Les douleurs, dès le stade aigu, atteignent un niveau pathologique à l’EVAD1 et pour le QDSA2 chez les patients chroniques. Ceci est également conforme avec d’autres études qui ont montré qu’un niveau de douleur initiale élevé prédisait la chronicité de symptômes.

Les patients whiplash chroniques souffrent également précocement d’un stress aigu. Ce résultat est important car cette comorbidité souligne l’impact du psychologique dans la manière dont l’accident a été vécu et dans la manière dont le stress résultant des douleurs va infl uencer précocement l’évolution du syndrome. Il n’est pas étonnant de voir que l’état d’anxiété permette précocement de distinguer les deux groupes. En effet, nous rappelons que le stress post-traumatique fait partie des troubles anxieux selon le DSM IV3 . Les tests cognitifs ne semblent pas en revanche de bons prédicteurs du WAD4 . Seule la fonction exécutive d’inhibition semble altérée chez les patients chroniques. Cela ne veut cependant pas dire que les symptômes cognitifs, souvent évoqués par les patients WAD4, n’existe pas. En effet, les patients souffrant d’ESPT5 se plaignent systématiquement de problèmes de mémoire et de concentration qui les handicapent au quotidien. La littérature sur les troubles cognitifs dans le PTSD6 est conséquente, révélant l’importance des difficultés cognitives que rencontrent ces patients (Koso & Hansen, 2006; Sachinvala et al., 2000).

Néanmoins, les déficits exécutifs observés chez les patients whiplash chroniques à un stade précoce sont intéressants puisque aucune étude n’avait évalué cette fonction à ce stade aigu du whiplash.

Les résultats observés ici semblent donc mettre en avant une atteinte du cortex frontal confirmant les travaux de Mosimann et al. (2000) sur des patients whiplash chroniques. En effet, cette structure corticale est impliquée dans la mise en oeuvre de l’inhibition. Des études ont ainsi montré que des patients présentant des lésions frontales et, plus spécifiquement de la région préfrontale, avaient des difficultés à inhiber les mouvements oculaires saccadiques réfl exes (Guitton, Buchtel, & Douglas, 1985; Pierrot-Deseillingny, Rivaud, Gaymard, & Agid, 1991).

 Perspectives ouvertes par le projet et verrous subsistants

Cette étude suggère que les patients de bas niveau de whiplash devraient être soumis le plus tôt possible après le traumatisme aux tests neuropsychologiques et de contrôle moteur dans une consultation spécialisée. En outre, ils doivent être évalués par un neuro-otologue pour un examen détaillé des fonctions vestibulaires.

S’ils sont diagnostiqués à risque de WAD4, ces patients doivent être pris en charge précocement selon un programme intensif de réadaptation préventive, de rééducation neurospychologique avec prise en charge psychologique et rééducation vestibulaire si nécessaire. Une demande ARS est en cours pour la mise en place d’une telle consultation dédiée aux victimes du Whiplash.

EVA D = échelle visuelle analogique (douleurs)
QDSA = questionnaire de Saint Antoine (douleurs)
DSM : Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux
WAD whiplash-associated disorders
ESPT = État de stress post traumatique
PSTD = post traumatic stress disorder